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5 septembre 2023

GREVISTE ET MALADE, ATTENTION A LA PERTE DE TRAITEMENT

5 septembre 2023

GREVISTE ET MALADE, ATTENTION A LA PERTE DE TRAITEMENT

Le Conseil d’Etat a rendu récemment une décision remarquée, confirmant une décision qu’il avait prononcée en référé en matière de traitement des agents publics « malades grévistes ».

 

Dans les faits, un centre pénitentiaire avait connu un mouvement social important. La direction de l’établissement avait alors reçu de multiples arrêts de travail de la part des agents, tous justifiés par une maladie.

 

En droit, il n’est pas contesté que lorsque l’administration soupçonne qu’un agent lui soumet un arrêt de travail de complaisance, pour pouvoir suspendre de rémunération un agent, elle doit au préalable saisir un médecin agréé afin de faire pratiquer une contre-visite.

 

Mais dans le cas particulier, eu égard au nombre important d’arrêts de travail et du mouvement social important qui touchait l’établissement, qui plus est dans lequel le droit de grève est encadré, le Conseil d’Etat a considéré que l’administration pouvait déroger à cette règle :

 

« 5. Il résulte des dispositions citées au point 4 que l’administration ne peut en principe interrompre le versement de la rémunération d’un agent lui demandant le bénéfice d’un congé de maladie en produisant un avis médical d’interruption de travail qu’en faisant procéder à une contre-visite par un médecin agréé. Toutefois, dans des circonstances particulières, marquées par un mouvement social de grande ampleur dans une administration où la cessation concertée du service est interdite, et la réception d’un nombre important et inhabituel d’arrêts de travail sur une courte période la mettant dans l’impossibilité pratique de faire procéder de manière utile aux contre-visites prévues par l’article 25 du décret du 14 mars 1986, l’administration est fondée, dès lors qu’elle établit que ces conditions sont remplies, à refuser d’accorder des congés de maladie aux agents du même service, établissement ou administration lui ayant adressé un arrêt de travail au cours de cette période. Ces agents peuvent, afin de contester la décision rejetant leur demande de congé de maladie, établir par tout moyen la réalité du motif médical ayant justifié leur absence pendant la période considérée. Ils peuvent également, malgré l’absence de contre-visite, saisir le conseil médical, qui rendra un avis motivé dans le respect du secret médical » (Conseil d’État, 6ème – 5ème chambres réunies, 21/04/2023, 450533).

 

La direction de l’établissement pouvait dont interrompre le versement du traitement aux agents et refuser d’accorder l’arrêt de travail.

 

L’agent doit alors prouver par tout moyen la réalité de la maladie. Le Conseil d’Etat donne d’ailleurs une piste pour démontrer la réalité de la pathologie : la saisine directe par l’agent du Conseil médical.

 

L’arrêt de travail, qui avait notamment été utilisé par les agents non vaccinés contre la Covid-19 pour échapper à la retenu de leur traitement, n’est donc pas une arme fatale contre l’administration, qui dispose de la faculté tant de réaliser des contre-visites, mais également, dans des circonstances particulières, de supprimer la rémunération des agents.

 

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Maître LE BORGNE, Avocat au barreau de Tours en droit de la fonction publique, est à la disposition des agents publics pour les assister tout au long de leur carrière.