Actualités

3 mars 2021

Délai de garantie de parfait achèvement

3 mars 2021

Délai de garantie de parfait achèvement

En matière de droit de la construction, il est fondamental de bien maîtriser les délais pour mobiliser les garanties.

 

La région Occitanie en a mesuré l’importance dans une affaire récemment jugée par la Cour administrative de Bordeaux (CAA de Bordeaux, 12 octobre 2020 n° 18BX02136).

 

Le 29 juin 2011, la région avait réceptionné l’hôtel de région fraîchement construit. Constatant des désordres, elle a saisi le juge des référés afin qu’il nomme un expert dont la mission consistait à évaluer l’étendue de ces désordres. L’ordonnance de désignation de l’Expert a été rendue le 10 mai 2012 et le rapport a été déposé le 17 juillet 2015.

 

Au regard du rapport, la région a demandé au Tribunal administratif de Toulouse de condamner le maitre d’œuvre à lui verser les sommes respectives de 146 277,50 €, 114 991,28 €, 2 808,87 euros et 87 437,76 €.

 

La région sollicitait notamment son indemnisation au titre de la garantie de parfait achèvement (GPA).

 

En première instance, la région avait obtenu un peu moins de 50.000 € (dont 24.041 € sur le fondement de la GPA) sur les 350.000 € sollicités. Elle a donc interjeté appel et la Cour administrative de Bordeaux s’est prononcée.

 

le délai de la GPA est d’un an à compter de la réception

 

Tout d’abord, l’on sait que le délai de garantie de la garantie de parfait achèvement est d’un an à compter de la réception. Le CCAG précisait à l’époque que « Pendant le délai de garantie (…) l’entrepreneur est tenu à une obligation dite  » obligation de parfait achèvement  » au titre de laquelle il doit : (…) b) Remédier à tous les désordres signalés, par le maître de l’ouvrage ou le maître d’oeuvre, de telle sorte que l’ouvrage soit conforme à l’état où il était lors de la réception ou après correction des imperfections constatées lors de celle-ci (…) Les dépenses correspondant aux travaux complémentaires prescrits par le maître de l’ouvrage ou le maître d’oeuvre ayant pour objet de remédier aux déficiences énoncées aux b et c ci-dessus ne sont à la charge de l’entrepreneur que si la cause de ces déficiences lui est imputable (…) « . Selon l’article 44-2 du même cahier :  » Prolongation du délai de garantie : / (…) le délai de garantie peut être prolongé par décision de la personne responsable du marché jusqu’à l’exécution complète des travaux et prestations (…) « .

 

Ainsi, la région avait la possibilité de prolonger ce délai au-delà d’un an.

 

L’article  2241 du code civil dispose quant à lui  que :  » La demande en justice, même en référé, interrompent le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion (…) « . Selon l’article 2242 du même code :  » L’interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu’à l’extinction de l’instance « .

 

Pendant le délai d’un an, la GPA s’étend à la reprise d’une part des désordres ayant fait l’objet de réserves dans le procès-verbal de réception, d’autre part de ceux qui apparaissent et sont signalés dans l’année suivant la date de réception.

 

Une demande en référé interrompt le délai de GPA

 

la Cour administrative d’appel a rappelé « qu’une demande en référé présentée par une collectivité publique, tendant à la désignation d’un expert aux fins de constater des désordres imputés à des constructeurs, ou d’en rechercher les causes, a pour effet d’interrompre le délai d’un an à l’expiration duquel la responsabilité de ces constructeurs ne peut plus être recherchée devant le juge administratif à raison de ces désordres sur le fondement de la garantie de parfait achèvement. Ce délai commence à courir à nouveau à compter de l’ordonnance statuant sur la demande d’expertise ».

 

Dans les faits, la région Occitanie avait bien respecté le délai d’un an pour saisir le juge des référés. Le délai de la GPA a été interrompu le 10 mai 2012, date de la notification de l’ordonnance de désignation d’Expert, et expirait le 10 mai 2013.

 

Les ordres de service doivent dénoncer précisément les désordres pour interrompre la prescription

 

La région pouvait également, par ordres de service, dénoncer des désordres pendant cette période. Mais elle ne l’a fait que pour un seul désordre concernant la canalisation des eaux pluviales, mais pas pour  l’absence de store intégré en allège dans le mur rideau, la non-conformité de la note de calcul lui permettant de bénéficier de la norme RT 2005, aux déformations des joints de dilatation de la passerelle.

 

L’enregistrement de la requête ayant été effectuée le 28 septembre 2015, le délai de garantie de parfait achèvement était expiré. La Cour administrative d’appel a donc annulé la condamnation prononcer à l’encontre du maitre d’œuvre à verser à la commune la somme de 24.041 € sur le fondement de la GPA.

 

in fine, le Maître d’œuvre a été condamné à verser 23.680 € à la région Occitanie. Mais dans le même temps, la région a été contrainte de régler 90% des frais d’expertise, soit 23.269,96 €, outre 1.500 € de frais de procédure à 4 parties à la cause.

 

Ainsi, l’absence de dénonciation des désordres dans le délai imparti a causé un préjudice évident à la personne publique.

 

Cette arrêt démontre que le droit de la construction impose une vigilance de tous les instants afin que des désordres, qui souvent sont réels, puissent être réparés ou indemnisés.

 

Article rédigé par Me LE BORGNE

 

Maître Guillaume LE BORGNE, Avocat en droit administratif à Tours, assiste et conseille ses clients en matière de litige en droit de la construction et droit de l’urbanisme.

Vous pouvez le contacter directement au 07 81 42 81 92, au travers du formulaire de contact ou encore par courriel contact@cabinetleborgne.fr